Athlétisme

Damien Inocencio : "A l’INSEP, les athlètes auraient fait le mur"

Damien Inocencio : "A l’INSEP, les athlètes auraient fait le mur"
Head coach de l’équipe de Chine de saut à la perche, le Clermontois Damien Inocencio est passé du confinement chinois au confinement français. Témoignage. 

En tant qu’entraîneur de l’équipe nationale chinoise de perche, quand avez-vous été confronté aux mesures de lutte contre le coronavirus ?

« Lorsque j’étais dans un des centres d’entraînements olympiques à Pékin. Le 22 janvier, jour de la mise en place du confinement, tout a été bouclé. Il y avait deux sorties possibles, les deux portails étaient fermés avec des gardiens. Plus personne ne pouvait entrer ou sortir. Le stade était à un kilomètre. En bas de chaque bâtiment, il y avait prise de température, ensuite on montait dans le bus avec un tapis au sol rempli de désinfectants, tous avec nos masques distribués dès le premier jour. Mais des masques en Asie, les gens en portent toute l’année, pour la pollution en premier. »

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Avez-vous redouté la contagion en Chine ?

« Non, le confinement était très bien fait. Tout a été bloqué très vite. J’ai peut-­être été un peu naïf mais avec le système mis en place, dans un endroit clos et sain, je n’avais aucune raison de l’attraper. A la cantine, par exemple, les gens passaient mains lavées avec un masque qu’ils n’enlevaient que pour manger. Je ne me suis jamais senti en danger. En revanche, je savais que le coronavirus allait venir dans le reste du monde car il est impossible de le bloquer. C’était une question de temps. »

Quelles comparaisons pouvez-vous faire entre les systèmes de confinement en Chine et en France ?

« En France, on garde plus de liberté, on peut sortir. En Chine, il n’y a aucune dérogation. Mais les Chinois sont plus tranquilles. Et souvent le confinement leur a permis de se retrouver en famille ou en couple. En revanche, les athlètes confinés dans les centres d’entraînement à Pékin le sont depuis le 22 janvier. C’est plus long et c’est dur. Si on avait pris les mêmes mesures à l’INSEP, au bout de quelques jours les athlètes se seraient débrouillés pour faire le mur... »

« Huiqin Xu me disait parfois "les gens me regardent bizarrement". »

Avez-vous ressenti à un moment, vous même ou un de vos athlètes, un sentiment anti-chinois lorsque vous étiez à nouveau en France ?

« Non, je ne l’ai pas senti. Huiqin Xu me disait parfois "les gens me regardent bizarrement". Mais peut-­être se sentait-­elle un peu coupable parce que le virus venait de son pays, alors qu’évidemment, elle n’y est pour rien. Personnellement, je n’ai rien vu. Les copains nous faisaient des petites blagues de vestiaires mais on n’a pas été blacklistés sur les compètes en Europe, et à Clermont, au Stadium, ça s’est très bien passé, jamais le moindre problème. »

Où est votre groupe d’entraînement, aujourd’hui ?

« On a finalement été rattrapés. Le groupe a explosé, tout le monde est soit confiné chez lui soit rappelé dans son pays, comme les athlètes chinois. »

Comment pouvez-vous entraîner vos perchistes ?

« Pour Mallaury Sautereau, en France, c’est assez simple, on communique par téléphone. Pour Huiqin Xu, actuellement confinée dans une chambre d’hôtel à Tsingtao sans même pouvoir aller dans le couloir, on travaille en ligne. Elle suit une séance cardio, physique, sur l’application Nike Training, le matin, et, l’après­-midi, je lui fais une séance en vidéo plus spécifique athlé avec petits bondissements, course sur place, montées de genoux avec système d’élastique, etc. »

« Des compètes pour août et septembre »

Mais le report des Jeux olympiques ne reporte-t-il pas également les nécessités de l’entraînement ?

« D’abord, cet été, il y aura la Diamond League. Et puis, il faut se projeter sur les JO et, avant, sur les Mondiaux en salle à Nankin, en mars. Une athlète comme Huiqin doit rentrer dans les meetings internationaux pour s’habituer au haut niveau et gagner des points au ranking mondial. Pour cela, on va planifier des compètes pour août et septembre. Pour l’instant, on saisit l’opportunité du confinement pour travailler le physique et ses points faibles comme son épaule droite. »

2021 va donc concentrer tous les objectifs ?

« Cela va être une année énorme où beaucoup d’athlètes vont arriver en ayant faim et après avoir beaucoup travaillé. Tous ceux qui se disent "on reprendra en septembre" font une grosse gaffe. Le top départ pour 2021, c’est aujourd’hui. En 2019, la préparation aux Jeux commençait au lendemain des Mondiaux de Doha. Là, c’est beaucoup plus tôt. »

 

Francis Laporte 


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